samedi, 21 juillet 2018
Bac 68 : pas un mauvais bac!
Permettez-moi en tant que lauréate du bac 68, de défendre mon bac avec véhémence! Et le bac littéraire de 68 qui plus est, meilleur que le bac scientifique, s'il vous plaît
Les lauréats du bac technique, et pro qui attendent leur place sur Parcours Sup, devraient se dire qu'à l'époque, ils n'auraient jamais pu être lauréats du bac et n'auraient jamais pu participer à Parcours Sup!
En effet, on a dit qu'en 68, le bac était un mauvais bac! A cause des évènements que pendant les vacances de Pâques 68, on ne pouvait pas prévoir. J'étais alors chez ma correspondante allemande pour quinze jours (quand mes parents sont venus me chercher, j'étais tellement dans le bain linguistique que je leur ai parlé allemand couramment sans le vouloir avec seulement quatre ans et demi d'étude de cette langue et je comprenais toutes les explications historiques que l'on me donnait sur les monuments de la ville où j'étais).
Bon, ceci dit… j'en reviens au bac 68. Où les meilleurs étaient en littéraire (la première année de la reforme du bac où les bacs A, C et D ont remplacé les classes de Philo, Maths Elem et Sciences Ex.
Pour aller en littéraire, il fallait montrer patte blanche, car c'est déjà à l'école primaire que se préparait le choix de cette section.
En effet, à l'issue du CM2 ou de la 7ème, le CM2 étant dans les écoles primaires de quartier qui avaient un cours supérieur pour le CEP (certificat d'études primaires, sans langue vivante ou ancienne) et la 7ème dans les classes primaires de lycée.
A l'issue de CM2 ou de la 7me, on décidait si vous alliez entrer en 6ème ou pas, et si vous veniez d'une école primaire sans collège et lycée, il fallait passer 'l'examen d'entrée en sixième" qui allait décider de votre avenir : admis ou pas, admis en classique (avec latin) ou en moderne (sans latin). La section la plus noble étant celle avec latin, où l'on mettait les bons en grammaire (il fallait bien savoir faire les analyses grammaticales et logiques, celles-ci étant les analyses de phrases), et généralement si vous étiez bon en grammaire, vous étiez aussi parmi les meilleurs en maths.
Dans ma classe de 6ème classique, où j'avais été admise, la seule de ma classe de CM2, la moitié des élèves avaient comme moi, sauté une classe de primaire et avaient un an d'avance, c'est à dire 10 ans dans l'année civile, une élève avait même 9 ans dans l'année civile.
Parmi la quinzaine d'élèves de CM2, une seule était dans mon établissement, mais en moderne (donc, sans latin) et les autres étaient soient dans une sixième d'enseignement court (sans lycée avec arrêt des études en troisième) ou étaient montées au cours supérieur de l'école primaire avec la directrice pour passer le certificat d'études primaires.
Ce Certificat appelé CEP était d'ailleurs très côté, les garçons qui le réussissaient faisaient sauter des pétards dans les rues pour fêter leur victoire. Mais les pétards faisaient moins de bruit que les pétards actuels!!!
A l'époque, si vous alliez jusqu'au brevet, vous étiez une star, et si vous étiez en seconde, presque un ou une extra-terrestre. Ce que je fus.
Seconde, la première année de la réforme, nous ne devinrent ni des philo, des maths elem ou des sciences ex..., mais des A, des C ou des D. La section C ne se fit que dans les lycée de garçons (ce n'étaient pas la mixité) alors je n'ai pas été en seconde C. Mes parents s'opposant formellement à ce que je sois la seule fille dans une classe de garçons...
Alors, je fis, comme presque toutes mes camarades de sixième classique, la section littéraire, où avaient été mises quasiment toutes les latinistes de sixième, les meilleurs, alors que la seconde C était prise d'assaut par les meilleures élèves venant de l'enseignement court et ayant eu leur passage en seconde. Elles venaient en majorité d'autres écoles qui se terminaient à la troisième. Donc celles qui n'avaient pas eu leur entrée en sixième classique quatre ans auparavant.
Facile le bac 68?
J'étais dans une classe A de 40 élève, je n'étais plus latiniste, mais la plupart de mes camarades l'étaient. Il y avait les sessions de juin et de septembre. Je l'ai eu en juin plutôt juillet, car les épreuves avaient été retardées en raison des évènements. Avec mention AB. Sur la classe de 40 élèves, j'étais dans les 7 premières. Il y a eu une mention très bien, une bilingue de naissance franco-allemande, qui avait fait de l'anglais en sixième et de l'espagnol en quatrième, et avait pris LV1 allemand, LV2 anglais et LV3 espagnol, la triche, quoi, elle avait deux ans de plus que les autres dans chaque langue… et toute l'année, elle a eu 18 en allemand.
Les deux mentions bien étaient normale, deux latinistes qui étaient déjà les meilleurs de la première A l'année précédente.
Puis les mentions AB au nombre de 4, dont 3 étaient les mathématiciennes, dont moi. Les bac lettres et philosophie (8 heures de philo par semaine l'époque!, option maths et seconde langue vivante (l'allemand pour moi). Toutes mes notes au"dessus de la moyenne, et 13 de moyenne. C'était la section 14 devenue A1 par la suite.
15 élèves sur les 40 ont réussi leur bac en juin et 15 élèves en septembre avec moins de mentions (une mention AB en septembre seulement). Ce qui faisait pour cette excellente classe issue de la sixième classique latiniste, 75% de réussite, alors le bac 68, facile????
Il n'y avait pas de parcours SUP à l'époque, la fac commençait le 1er novembre, et on s'inscrivait à partir du mois de septembre, de quoi passer des grandes vacances tranquilles et avoir le temps de choisir.
A la rentrée de novembre, j'étais en allemand. 400 étudiants dans l'amphi, car il n'y avait à l'époque qu'une seule université dans la région. En anglais, ils étaient 1500. Dans l'amphi d'à côté. Certains écoutaient le cours dans le couloir. Même en allemand, des étudiants étaient assis sur les escaliers de l'amphi, en rangs serrés. On avait passé un test pour la répartition dans les groupes de niveau en TD. Il y avait 10 groupes, j'étais dans le groupe 5, ce qui pour une ancienne LV2, n'était pas mal du tout! Dans l'amphi, les rangs se sont éclaircis dans le cours de l'année, sans compter que l'agitation estudiantine de 68 continuait : grèves, occupations d'amphi, des étudiants entrant brusquement et empêchant le professeur d'officier, et le micro de l'amphi qui tombait en panne, si bien que le professeur qui faisait la civilisation allemande des origines à 1945 a répété 50 fois : "Die Germanen sind die Vorfahren des Deutschen und…."... et après cette phrase le micro de l'amphi tombait en panne.
Les rangs se sont éclaircis en cours d'année. Beaucoup abandonnaient ou prenaient un job étudiant, 'il n'y avait pas d'examens semestriel, les premiers examens que l'on passait étaient en juin… en attendant on faisait des devoirs de traduction et des exposés si on en avait envie.
A l'époque, on pouvait être MA avec une année de fac réussie et en deuxième année, beaucoup enseignaient déjà et passaient le concours de PEGC pour enseigner en collège.
Quand on réussissait tous ses examens en juin, on était en vacances pendant quatre mois. La belle vie, quoi! Mais on avait bossé comme des dingues dans le secondaire! Et même depuis la maternelle!!!
Concernant les examens, c'était comme au CAPES ou à l'agrégation, il fallait réussir l'écrit pour avoir le droit de passer l'oral. Ce n'était pas un oral de contrôle, mais un oral obligatoire que l'on passait fin juin pour la session de juin, à condition d'avoir réussi l'écrit. Donc, l'écrit passé début juin, donnait l'autorisation de passe l'oral, qui avait lieu fin juin. On avait les résultats de l'écrit vers la mi-juin. Et si on avait réussi l'écrit, c'était une première victoire, on passait l'oral. Ceux qui n'échouait qu'à l'oral et avaient leur écrit, gardaient le bénéfice de l'écrit pour la session de septembre et ne devaient alors que repasser les oraux auxquels ils avaient échoué.
La belle époque, mais demandez-vous, auriez vous été en terminale, avec le parcours du combattant que l'on menait dès avant la sixième...
domino
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